Chanson Douce de Leila Slimani fut publié en 2016. Pour cet ouvrage, Leila Slimani a obtenu le prix Goncourt la même année. Le 27 Novembre prochain sortira l’adaptation cinématographique de cette œuvre qui est en réalité une histoire vraie. L’histoire qui a servi de base à cet ouvrage est celle de la nounou tueuse de l’Upper East Side qui avait défrayé la chronique en 2012.
En quelques mots, le roman de Leila Slimani nous narre l’histoire d’une nounou parfaite qui bascule dans une folie meurtrière et tue les deux enfants dont elle s’occupe. Ces enfants sont ceux de Paul et Myriam, des parents débordés qui croient trouver en Louise une bonne fée résolvant tous leurs tracas. L’illusion dure un temps avant que le piège ne se referme sur la famille.
Ce roman est une porte d’entrée dans l’esprit tourmenté d’une femme que tout accule. Leila Slimani nous tient en haleine tout au long de ce récit. Son style d’écriture, à la fois simple et entraînant, l’intrigue en elle-même ainsi que la construction de ses personnages font que pas un seul instant nous ne nous ennuyons. Après un début sous forme d’électrochoc, nous suivons cette histoire de manière chronologique, comme si, au final, nous étions l’inspectrice Nina Dorval, et que, comme elle, nous tentions de nous mettre dans la peau de Louise afin de reconstituer les éléments du puzzle ayant mené à ce dénouement tragique.
L’histoire est compliquée, lourde à porter, angoissante pour le lecteur qui est tenu d’avancer avec Louise. Elle est comme un miroir qui nous renvoie le reflet de nos pensées les plus intimes. Qu’aurais-je fait dans la situation de Louise, elle qui avait l’air si parfaite. Aurais-je pu basculer ainsi ?
Commencer par la fin m’a surprise puis séduite. “Le bébé est mort”. Cette annonce l’inéluctable, l’inacceptable. Durant tout le roman je tente de saisir la logique de ce double meurtre mais l’auteur ne nous facilite pas la tâche : Mila et Adam se trouvent être des enfants attachants et pleins de vie et non les monstres qui auraient pu pousser à bout leur nounou. Du coup, mon attention s’oriente tout entière vers Louise : j’essaie d’analyser, avec en tête ce dénouement atroce, tous ses faits et gestes. Son personnage est, sans aucun doute, l’élément le plus énigmatique et le plus intéressant de cette histoire. Leila Slimani nous dépeint une nourrice parfaite qui s’avère n’être qu’une ombre, une apparence, une illusion trompeuse. Derrière cette image lisse se cache la détresse de la solitude, de l’envie, de la souffrance et de la peur de l’abandon. Insidieusement, Louise va tisser sa toile au sein de cette famille pour mieux la piéger. Pourtant, et c’est la force de ce roman, j’avoue que je me suis attachée à cette femme et, chose impensable, j’arrive même à comprendre son geste.
Leila Slimani, dans son œuvre, nous propulse au cœur de la misère sociale et des défauts de la société actuelle. Nous nous retrouvons face à des parents qui n’ont plus le temps, des enfants délaissés, des gens pauvres qui se retrouvent à crouler sous les dettes, des gens sans papiers et le tout dans une indifférence générale des uns pour les autres. Cette accumulation de problèmes sociaux, nous informe de manière frappante de ce qui ne va pas dans nos vies.
Lire ce livre a été pour moi source d’une véritable angoisse à la fois terrible et appréciable. Mon intérêt pour l’intrigue m’a paru malsain et pourtant chaque jour, j’attendais avec impatience le moment de poursuivre ma lecture. La beauté de cet ouvrage m’a surprise et je ne peux que vous conseiller de vous plonger à votre tour dans l’esprit tortueux de Louise qui vous obligera à nuancer votre jugement et à ne plus condamner sans appel des auteurs de faits divers…